Nathalie Gauglin, un regard terrestre.

Le travail de la terre est, chez Nathalie Gauglin, une fenêtre ouverte sur le monde du sensible. L’humain est au coeur de sa création expressionniste : l’être étant à la fois inspiration, représentation et interprétation. Son oeuvre fait preuve d’une pureté exceptionnelle. S’y attarder, s’y confronter, c’est faire un pas dans un univers où le geste et la matière remodèlent une vie ou plus exactement remodèlent la vie.

Chaque pièce résulte d’une alchimie délicate entre l’artiste et la matière. Dans son atelier, l’artiste sculpteur travaille le grès. A partir d’un grand pain de terre, la forme est imagée. Mirettes et ébauchoirs en bois affinent le travail et dessinent les détails. Après dix heures de cuisson et trente heures de refroidissement, une pièce unique voit le jour. Certains personnages trouvent place sur des souches de bois, certaines pouvant rester plusieurs années dans l’atelier avant qu’une pièce s’y installe. La nature est une grande inspiratrice pour l’artiste.

Nathalie Gauglin donne à sa sculpture une force d’expression peu commune et un monde troublant prend corps. Chaque oeuvre se voit absorbée, transcendée par son propre destin. Chaque détail du travail vient toucher notre sensibilité, notre perception : inclinaison de la tête, les yeux sombres... Après la main de l’artiste, un regard se perd dans le vide, des petites têtes pensives nous amènent à des interrogations, des frissons, un attendrissement par un être qui semble fragile, perdu face à un monde incompréhensible.

Ces petites êtres nous plongent dans des séquences de vie, un espace intérieur relevant de l’intime se voit faire face au monde extérieur. Réminiscence, résurrection d’une partie de nos existences : de petits fragments de ce que chacun souhaite dissimuler, un témoignage de notre propre fragilité. Face à cette transcendance, Nathalie Gauglin voue une revendication à regarder le monde autrement et s’approche au plus près de notre réalité. Son langage relève de l’humaine solitude, de nos doutes, de nos incompréhensions.  
Je songe désormais avec ses oeuvres et me laisse porter par un imaginaire. Je souhaite les toucher, les entrelacer pour les rassurer. Serait-ce une mise en abîme ? Un reflet de ma propre vie où la mélancolie règne sans conteste.


Louise Dubus